J’ai envie, aujourd’hui, de parler d’un autre matériau que le verre, le PVC, l’aluminium ou le bois : j’ai envie de vous parler de l’acier. Pourquoi l’acier ? Pas pour évoquer les très belles menuiseries que permet ce matériau noble. Non, mais pour faire référence à la fermeture inéluctable et programmée des hauts-fourneaux de Florange. Je sais que Verre & Protections magazine n’est pas l’endroit vraiment "ad hoc" pour disserter sur la disparition progressive de la sidérurgie française. Et pourtant, si on y regarde de plus près, cette véritable catastrophe industrielle, qui nous accompagne depuis bientôt trente ans, nous concerne de bien plus près qu’on l’imagine.
Il ne m’appartient pas de décerner ici blâmes ou hommages ; ni les 600 salariés lorrains concernés par cette fermeture, ni Monsieur Mittal ne sont responsables de ce qui passe dans l’acier européen. En effet, on nous dit que la consommation d’acier a baissé de 30 % depuis 2007 en Europe et que l’acier très haut de gamme produit à Florange est trop cher comparé à celui produit en Asie. Partant de ce principe, cela veut-il dire que tout matériau produit en France, donc plus cher mais plus haut en gamme, serait définitivement condamné ?
Ne nous complaisons pas dans le pessimisme et le "fin-du-mondisme"
Que signifie, d’autre part, la fermeture de Florange ? Tout simplement, la perte irrémédiable et sans retour d’un savoir-faire qui faisait la fierté ouvrière des Lorrains et de la sidérurgie, non pas locale mais bel et bien mondiale. Plus jamais ce tour de main, cette spécificité des hauts-fourneaux de Florange, ne reviendront, c’est une certitude. En matière de mutations industrielles, ce qui s’en va ne revient pas.
Et si, demain, cette situation se reproduisait à l’identique pour le double vitrage, les fenêtres, les stores, les portes de garage ? « Elle se produit un peu déjà », affirment certains pessimistes. C’est vrai, qu’est ce qui pourrait empêcher un industriel de la véranda ou du volet roulant de fermer son usine bretonne ou ses ateliers alsaciens ? Si nos industriels français agissaient comme Monsieur Mittal ?
« C’est comme ça, c’est la mondialisation, il faut s’adapter et proposer d’autres produits, d’autres services », expliquent, la bouche en cœur, des économistes qui n’ont jamais mis les pieds dans une usine. Des arguments que je considère comme irresponsables. Notre vieille Europe n’a quand même pas vocation à devenir un parc d’attractions, une réserve naturelle produisant du bon vin, des parfums et… des nougats de Montélimar pour attirer des millions de touristes asiatiques !
Où iront s’approvisionner nos industriels quand le transport maritime sera facturé au tarif qu’il devrait réellement coûter ? Où trouvera-t-on alors des ouvriers, des techniciens, des ingénieurs ayant les compétences nécessaires ?
Je n’ai pas vraiment de réponse fiable à apporter à ces questions. Mais ce que je sais, c’est que, si un jour les industries françaises du verre ou de la menuiserie suivent le même chemin que l’acier français, elles ne feront jamais le voyage dans l’autre sens. Elles non plus…
C’est cette irréversibilité liée à la perte de compétences et de savoir-faire transgénérationnels qui est vraiment anxiogène et qui doit nous faire militer, non pas pour la seule survie de la miroiterie ou de la menuiserie de notre ville, de notre région, de notre pays, mais tout simplement pour que nos petits-enfants puissent faire un autre métier que guide touristique, webmaster sur un site vinicole ou consultant en nougats de Montélimar !
Pour conclure, ne nous complaisons toutefois pas dans le pessimisme et le "fin-du-mondisme" ! Bientôt vont se tenir les salons Artibat et Equip’Baie, deux manifestations qui devraient tout de même nous rassurer sur les capacités des entreprises, toutes implantées dans nos régions, à produire, innover, créer, surprendre, provoquer, phosphorer… Bref, vivre ! Mais en parcourant la ruche bourdonnante que constituent ces deux intéressants salons, n’oublions toutefois pas Florange et son bel acier qui ne sera plus jamais produit en France. Ne l’oublions surtout pas, ça peut aider…
Bravo pour cet article qui sort un peu des chemins du « verre » et contente de savoir que vous êtes toujours en place.
Séverine Groshens (ex REHAU)
Bonjour Séverine.
Merc,i ça me fait plaisir de savoir que vous vous intéressez toujours à notre revue.
Avez-vous changé de secteur d’activités ?
Bien cordialement
Frédéric TADDEI