Le 21 janvier dernier la Commission de l’environnement du Parlement européen a adopté une résolution s’opposant à la proposition de la Commission européenne qui modifie les règles concernant la concentration de plomb, en particulier le plomb dans le pvc. Les députés estiment que les changements proposés ne protègent pas suffisamment la santé humaine et l’environnement, soit le principal objectif du règlement REACH.
Le règlement de la Commission européenne propose de restreindre l’utilisation et la présence de plomb et de ses composants dans des articles produits à partir de polychlorure de vinyle, fixant une concentration maximale de plomb à 0,1% du poids du matériau PVC. Il introduit également deux dérogations.
Pas d’exception pour le PVC recyclé !
Les députés déplorent justement ces deux dérogations proposées pour les matériaux PVC recyclés, qui dureront 15 ans. L’une autoriserait la concentration de plomb jusqu’à 2% du poids du PVC rigide et l’autre 1% du poids du PVC flexible/souple.
Les députés rappellent que le plomb est une substance toxique qui peut avoir de graves conséquences sur la santé, et notamment provoquer des dommages neurologiques irréversibles, même à petites doses. Ils estiment que les niveaux proposés par la Commission européenne ne correspondent pas à des "niveaux sûrs" et soulignent qu’il existe des alternatives au PVC. Ils insistent aussi sur le fait que le recyclage ne devrait pas justifier l’utilisation continue de substances dangereuses étant donné que la prévention a la priorité sur le recyclage.
Quelles sont les prochaines étapes ?
La résolution a été adoptée par 42 voix pour, 22 contre et 4 abstentions. Elle sera mise aux voix en plénière lors de la session de février à Strasbourg. Si le Parlement s’y oppose dans le délai imparti, fixé au 27 février prochain, le projet ne pourra pas être adopté par la Commission européenne. Cette dernière pourra soit soumettre un projet modifié, soit en présenter un nouveau.
Dans un communiqué, le Parlement affirme « qu’il estime depuis longtemps que le recyclage du PVC ne doit pas perpétuer le problème des métaux lourds. Le plomb dans le PVC est déjà éliminé progressivement dans l'UE depuis 2015 grâce à un engagement volontaire de l'industrie européenne du PVC, mais il continue d'entrer dans l'UE via des produits importés ».
La réaction du SNEP
Interrogé par Verre & Protections Mag, Yann de Bénazé, Président du SNEP (Syndicat National de l’Extrusion Plastique) a réagit à cette information.
« Que de contradictions et de contre-vérités !, déplore Yann de Bénazé. Le Plomb dans le PVC a été étudié de longue date, il est encapsulé et aucun largage dans la nature et vers les humains utilisateurs de profilés PVC n'a jamais été avancé, ni insinué, ni tenter d'être prouvé, c'est bien la preuve que nous ne sommes pas "attaquables" sous cet angle ! Cela ne veut pas dire que nous sommes pas pleinement conscient du matériaux brut et de ceux qui en amont produisait ce plomb ! »
« Le premier extrudeur a mis au point une recette sans plomb dès 1994, des années avant l'arrivée de REACH »
« On peut rappeler que le premier extrudeur qui a mis au point une recette sans plomb l'a fait dès 1994 donc des années avant l'arrivée de REACH et des années avant que le plomb soit proscrit, poursuit le président du SNEP. Donc même si nous n'étions pas en contact directe avec le plomb et que nos clients n'étaient pas exposé à cette matière, nous avions conscience donc dès 1994 bien avant REACH qu'il fallait trouver une alternative ! Certains ont adoptés les solutions sans plombs de manière industrielle à partir de 2000 puis d'autres plus tard mais dès 2010 l'immense majorité des acteurs en France avaient fait une bascule sur une production sans plomb. Maintenant, alors que l’on veut réduire l'utilisation des plastiques et réduire la consommation de matière plastique "neuves" en poussant à une accélération du recyclage ou réemploi des anciens châssis PVC ce qui se fait sans traitement chimique, ni consommation énergétique déraisonnable, on voudrait interdire le recyclage et "bruler les anciens châssis ou les enterrer en décharge", c'est "fort de café " comme disent certains et inacceptable pour nos professions. Sans parler d'un impact social et économique pire que le "bien" que certains cherchent ! », ajoute Yann de Bénazé.
« Laisser d'autres produits venir de plus loin avec des bilans environnementaux ou sanitaires beaucoup plus criticables que les nôtres »
« Nous ne sommes pas des artisans d'un protectionnisme prôné par certains de manière militante mais on ne peut pas condamner une industrie Européenne très tôt engagé dans une voix vertueuse et laisser d'autres produits venir de plus loin avec un bilan environnemental ou sanitaire qui dans ces pays plus lointains y ont un bilan beaucoup plus criticable.
Malgré nos explications, les études disponibles aussi bien sur nos matières que sur le processus de recyclagle, il semble que les politiques continuent une approche doctrinaire. Pourtant l'écart entre un "plomb" de chasse et la part de plomb intégré dans les recettes de stabilisant de l'époque, même une fois donc les anciens châssis démontrés et concassés, le plomb reste encapsulé dans la chaine moléculaire de sa première transformation, lors du recyclage les différents composants de la recette ne sont pas re-séparés donc personne ne sera en contact de cet part minime de plomb des recettes anciennes.
On veut espérer que nos représentants Français qui viennent, ces derniers mois, de mettre des objectifs ambitieux en matière de recyclage des plastiques sauront se faire entendre au niveau européen pour rétablir une approche constructive sur ce sujet », conclut Yann de Bénazé.
Propos recueillis par Frédéric Taddeï